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encore à se chercher lui-même, à l’âge ingrat qu’il traversait au commencement du XVIIe siècle, il avait besoin de nouveaux maîtres et de nouvelles leçons. La prose fit sa rhétorique, on l’a bien dit, avec Balzac, qui ne fut vraiment qu’un professeur de rhétorique. Malherbe fut le maître de philosophie, et non seulement il confia à la prose la sagesse de Sénèque, mais surtout il travailla à inculquer cette sagesse à la poésie « lyrique », qui écouta d’une oreille docile : et alors on put le regarder comme un nouveau Ponocrate, « instituant son élève en nouvelle discipline, et essayant de lui faire oublier ce qu’il avait appris sous ses antiques précepteurs ». La poésie lyrique avait montré au XVIe siècle la pétulance et les curiosités de la période enfantine, elle avait eu le maniérisme des premières coquetteries : et maintenant Malherbe lui commandait de prendre un maintien grave, d’avoir des idées sérieuses, logiques et précises, et des paroles sobres et nettes. Comme le maître de philosophie, il lui apprenait à faire avec règle et méthode tout ce qu’elle avait fait jusque là « sans le savoir ».


II. Virgile.


La poésie française, devenue si sage avec le disciple de Sénèque, restait poésie quand même, ou du moins voulait paraître telle : et pour cela elle devait se fleurir d’images. Mais n’ayant pas l’imagination exubérante, ni un sentiment bien vif de la nature, elle devait cueillir ses plus beaux ornements dans les livres plus que dans les champs.