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de l’utilité des études chinoises

tives, parfois des fortunes édifiées en quelques années, ont récompensé leur initiative. Les yeux se sont déjà ouverts en France sur l’importance économique de la Chine et sur la place qu’y occupent nos concurrents : la mission lyonnaise dirigée par M. Rocher, puis par M. Brenier, a rapporté des provinces peu connues qu’elle a parcourues, une moisson de documents dont une partie a été publiée ; ces publications, confirmant et précisant les vues que j’indique, insistent sur la nécessité en Chine de parler chinois. Ce n’est pas seulement au commerçant, c’est à l’industriel que ces conditions nouvelles s’imposent la Chine a cessé d’être uniquement le marché du thé et de la soie ; le traité de Simonoseki et le traité de commerce de 1896, dont toutes les puissances sont appelées à profiter par la clause de la nation la plus favorisée, autorisent les étrangers à élever des manufactures sur le sol chinois ; grâce au bon marché de la main-d’œuvre indigène, ce sera une source de profits pour les industriels étrangers, mais ils devront avoir des collaborateurs parlant chinois. Diverses entreprises, anglaises, japonaises, ont été fondées ; il faut que l’industrie française prenne aussi là sa place. Parlerai-je des mines concédées de tous côtés, des chemins de fer à l’étude ou en construction, des postes impériales dont il a été question ? tout cela exigera un personnel étranger parlant chinois ; et ce personnel sera requis en nombre de plus en plus grand, à mesure que les rapports économiques se développeront.

Voilà en quelques mot quelle est l’utilité des études chinoises. Ce que j’ai dit du chinois, je le dirais aussi, dans une certaine mesure, d’autres langues de l’Extrême-Orient ; nous avons, par exemple, en Annam et au Japon, des intérêts de nature et d’importance diverses, qui ne doivent être négligés ni les uns ni les autres et qui gagneront à être défendus et représentés par des hommes connaissant bien la langue et les mœurs nationales. Il ne faut oublier d’ailleurs ni que l’industrie étrangère n’a rien à faire au Japon, en raison du grand développement économique du pays, ni que l’annamite est sans utilité en dehors de l’Indo-Chine orientale : en somme, le chinois est toujours la langue principale de l’Extrême-Orient, parce que c’est la civilisation chinoise qui a modelé les peuples de toute cette région du globe.

Maurice Courant.