Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/107

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

soir surtout qu’elle s’y enfermait avec le plus de douceur, dans une solitude qui exaltait ses pensées au milieu de tous ces objets familiers, choisis et disposés avec tant de goût.

Elle s’y délassait aussi dans la lecture des livres préférés du jeune homme, après des journées de grande activité. Car elle avait assumé tout de suite les corvées du ravitaillement ; aussi bien, ces courses quotidiennes, ces longues attentes à la file devant les divers bureaux de l’Alimentation étaient autant de dérivatifs à son chagrin. Elle sympathisait déjà beaucoup avec Charlotte et Martha, qui venaient souvent la chercher pour se rendre ensemble au marché ou chez les fournisseurs.

La curiosité du quartier, fort ralentie depuis la guerre, ne l’importuna pas longtemps. Personne du reste qui ne fît bon accueil à cette étrangère dont le malheur ajoutait comme un nouveau charme à sa personne. Seuls, les Buellings continuaient à commenter l’arrivée de l’orpheline avec leur malveillance habituelle, ne pardonnant pas à la jeune fille de ne jamais se montrer aux visites que la femme et la fille du sellier multipliaient chez les Claes dans le seul but de l’observer de plus près.

Mlle  Hortense. qui la rencontrait souvent en compagnie de Martha et de Charlotte, était la plus outrée de jalousie :

— Qu’est-ce qu’elle pense donc celle-là avec ses grands airs ! Qu’on est au-dessous d’elle peut-être ? Et ça se promène avec la fille d’un coiffeur !