Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/155

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toujours impatient qu’on entamât la partie de cartes :

— Est-ce qu’on joue oui ou non ? grognait-il. Tout à l’heure, il va être temps de partir…

Le sellier se desséchait de plus en plus, ressemblant à une momie démaillotée d’une époque très ancienne. Il jeûnait avec l’héroïsme de l’avare, soutenu par sa bile et les perspectives de gain que lui assuraient ses réserves de cuir enfermées en d’impénétrables cachettes. Pourtant, les confidences de sa fille sur l’amabilité de Mme De Bouck avaient quelque peu adouci son humeur à l’égard du charbonnier ; depuis ce jour, il l’acceptait plus volontiers comme partenaire, lui épargnant ses injures quand celui-ci commettait quelque bévue. Du reste, rassuré sur le sort de son fils, De Bouck se montrait à présent moins distrait, sinon plus adroit.

En revanche, le hargneux bourrelier en voulait plus que jamais à Vergust, quoique son attitude envers lui continuât à garder ostensiblement les formes de la bonne entente. Il reprochait au tripier l’activité de son commerce, ses bénéfices énormes et, par dessus tout, cette bienfaisance qui n’était certainement chez lui que du calcul et un moyen de se rendre populaire. Est-ce qu’il n’avait pas imaginé à présent d’exposer dans sa boutique le portrait d’une demi-douzaine de prisonniers auxquels la maison envoyait régulièrement des « colis » ? Quelle ostentation de philanthropie !

Buellings enrageait de l’entendre partout appeler « ce brave Vergust », « ce généreux