Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/169

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ques âmes d’élite avaient deviné son secret et ne lui en témoignaient qu’une affection plus respectueuse ou plus tendre. C’est ainsi que Bernard savait la vérité, prenant sur lui pour cacher la joie qu’il en ressentait.

Or, il arriva qu’un jour, surpris par Camille dans une pose d’adoration auprès de l’enfant endormi, cette exclamation lui était échappée :

— Oh ! excusez-moi, Madame !

Il avait oublié de l’appeler Mademoiselle comme à l’ordinaire. Mais la jeune femme ne voulut pas qu’il essayât de réparer sa prétendue méprise :

— Oh ! laissez, dit-elle affectueusement. Oui, mon ami, c’est le fils de Prosper. Votre cœur l’avait deviné et j’en suis bien heureuse !

Depuis la mort de son patron, le pauvre infirme n’avait encore goûté un si doux moment.

Au reste, la beauté de Camille le subjuguait au point que son affection pour la fille de Théodore s’en était épurée sinon amoindrie : la souffrance d’un amour impossible ne le torturait plus. Il aimait Martha comme une sœur, ce qui l’avait affranchi de sa timidité et lui donnait à présent cette confiance charmante avec laquelle il entretenait la jeune fille à chacune de ses visites dans la quincaillerie.

Elle y venait plus souvent que jadis, attirée non tant par ses devoirs de pourvoyeuse que par la tendresse que lui inspirait le petit garçon. Et Camille la chérissait depuis le séjour qu’elle avait fait aux Peupliers en suite de l’ordonnance du docteur Buysse. Martha était venue l’y rejoin-