Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/20

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tandis que Tom, la tête posée sur ses genoux levaient vers lui des yeux pleins d’interrogations, en poussant parfois des gémissements plaintifs à la pensée de celui qu’il ne voyait plus.

Le départ de Prosper avait enlevé toute sa vaillante gaîté. Et puis, ce petit palais de l’outillage, admiration du quartier, lui inspirait peut-être un peu d’inquiétude en ces heures sombres. La transformation de la vieille boutique n’avait-elle pas été un travail prématuré ? Les remarques perfides, la jubilation sardonique de Buellings, l’impressionnaient malgré lui. Car le sellier venait le voir assez souvent pour jouir de sa tristesse encore qu’il se défiât de Tom, qui ne l’aimait guère et grondait toujours à son approche.

— Hein, quelle chance que je n’ai pas commencé les travaux chez moi ! s’écriait le vilain homme. Mais depuis longtemps, je sentais qu’il y avait quelque chose dans l’air, et c’est pour ça que j’ai renvoyé mon entrepreneur.

Et, sous prétexte de bons conseils, il effrayait le quincaillier :

— Est-ce que vous n’avez pas peur que ce grand magasin et ces belles marchandises ne soient du goût des Boches ? À votre place, je ne serais pas tranquille. Hé ! ce n’est pas pour rien que Mosheim s’arrête si souvent sur le trottoir d’en face pour regarder votre maison… Méfiez-vous…

— Mosheim ? interrogeait le vieillard. Qui est celui-là ?

— Vous ne savez pas ? Mais Prosper a dû