Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/85

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— Mais non, dit-elle d’un ton rassuré, il continue à dormir. C’est un rêve qu’il fait, sans doute…

Le vieux s’était redressé et son regard, subitement animé et plus clair, s’efforçait de percer les demi-ténèbres de la salle :

— Il fait si sombre de ce côté, dit-il à voix basse ; est-ce qu’il n’y a pas moyen de l’amener ici ? Ça m’amuserait de voir dormir ce petit gaillard…

— Attendez, Père…

Et, avec grande précaution, la vieille dame poussa la voiture jusqu’au fauteuil du paralytique.

L’enfant reposait presque nu, tout rose au milieu des blancs coussins de son berceau roulant. Penchés sur son sommeil heureux, les bonnes gens contemplaient ce petit masque volontaire que plissait parfois une grimace furtive, et les merveilleuses miniatures de ses mains qui remuaient, ouvrant et refermant leurs doigts comme pour saisir quelque joujou invisible. Déjà, un soyeux duvet blondissait son crâne, tandis que certains fils plus longs et plus dorés s’en échappaient, qu’une moiteur collait à son large front.

Sa figure n’avait plus rien de strapassé et commençait à prendre de la physionomie. C’était un marmot de bonne charpente, sans tare, dodu, bien parti pour la vie.

— Qu’il est heureux d’être si petit ! dit la bonne dame. Il ne sait pas comme il fait triste maintenant…