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PRÉLIMINAIRE.

L’organe de la parole, ſemblable en cela aux autres organes de notre corps, eſt tel qu’il ſe prête à l’inſtant à nos déſirs. Comme nos bras, nos pieds, notre tête, s’ébranlent, s’agitent, ſe remuent à notre ſimple volonté, ainſi l’inſtrument de la parole fait entendre des ſons dès que nous déſirons qu’il en rende : notre déſir met le ſang en mouvement, le ſang pèſe ſur les poumons, & chaſſe l’air qu’ils contiennent, cet air eſt comprimé par les divers muſcles du goſier ou du larynx, d’où il raiſonne dans la cavité de la bouche, comme l’air dans le corps d’un inſtrument : mais il y raiſonne d’une maniere différente, ſelon les diverses compreſſions qu’il a reçues du larynx, & le plus ou le moins d’ouverture de la bouche, toujours correſpondante à la maniere dont le larynx a comprimé l’air ; ou ſelon les parties même de la bouche qui ont été ébranlées pour le même effet : car toutes ces choſes contribuent à modifier la voix.

Il eſt même à préſumer, d’après les expériences d’un habile Phyſicien[1], que les muſcles du larynx ſont tels qu’ils ne ſont pas tous mis en jeu à la fois lorſqu’on parle, qu’ils different les uns des autres relativement à leur force ; & que, ſuivant qu’on veut produire des ſons plus ou moins graves, on ébranle des muſcles qui exigent pour ſe mouvoir plus ou moins de force, une contraction plus ou moins ſenſible.

La voix modifiée par le larynx & par le plus ou le moins d’ouverture de la bouche, produit les sons, qu’on peint par les caractères apellés Voyelles : cette même voix modifiée par le larynx & par la preſſion des diverſes parties qui conſtituent la caiſſe de l’inſtrument vocal, produit les tons, qu’on peint par les caractères apellés Conſonnes.

  1. M. Ferrein, Mém. de l’Acad. des Sc. ann. 1741.