Page:Courteline - Les Linottes, 1899.djvu/137

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succès forcé, pour satisfaire aux fantaisies d’un épileptique.

Conciliant :

— Voyons, fit Cozal ; voyons !

Mais Hour :

— Rien n’est su, rien ! ni la musique, ni la pièce ! Où sont les costumes ; où sont-ils ? Et le décor ! Où est le décor ? J’exige qu’on nous montre le décor ! Est-ce qu’on se fout de nous, à la fin ? La représentation n’aura pas lieu jeudi… Je la ferai interdire par ministère d’huissier.

— Par huissier ?…

Hamiet se tordit, lâché dans un de ces rires bruyants dont des milliers et des milliers de soufflets ne paieraient pas l’impertinence.

Il répliqua qu’il se fichait des huissiers et, plus encore, de ceux qui les faisaient venir, et cette aménité en amenant une autre, le directeur et le musicien échangèrent des bordées d’injures, toujours à la troisième personne. Hamiet prit le dessus enfin. À vrai dire, il bénéficiait de son sang-froid, alors que la fureur de Hour s’étranglait en de vagues et rauques aboiements. En vain, ce malheureux, éperdu, en appelait à son collaborateur, répétait : « Mais parlez, Cozal ! mais parlez donc ! Allez-vous nous laisser égorger par ce fou ? », Hamiet couvrait tout de sa voix, comme Richelieu de sa pourpre.

Sa conclusion fut un arrêt de Cour, sans appel.

— J’ai dit que nous passions jeudi, je le répète pour ceux qui n’ont pas entendu. Le service à la presse est fait, la garde commandée et tout, et j’ai donné, il y a une heure, le bon à tirer de l’affiche : c’est dire qu’il n’y a pas à revenir là-dessus. Par conséquent, voici l’ordre et la marche : demain, dimanche, lundi, mardi et mercredi, dernières répétitions