Page:Courteline - Les Linottes, 1899.djvu/45

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— Donc, comme ça, c’est fini ? Jamais plus nous ne nous reverrons ?

Marthe se récria :

— Pourquoi donc ?

— Dame !…

Elle reprit :

— Nous nous verrons comme avant !… un peu moins à jours fixes, peut-être ; voilà tout.

— Bien vrai ?

— Bien vrai.

— Tu le jures ?

— Je le jure. Aurais-je jamais une heure de liberté, qu’elle ne soit pour toi, mon chéri.

Cozal, plein de gratitude, lui cria qu’elle était un chou.

— Mon roi, fit-elle.

— Mon cœur, dit-il.

À travers les pleurs mal séchés qui leur mouillaient encore les cils, les deux amoureux se sourirent. Leurs bouches, une fois de plus, s’enlacèrent, attardées sur l’ivresse de la caresse dernière ; puis, spontanément, se désunirent, afin d’arrêter, en commun, des initiales pour la poste restante. Robert Cozal prit celles de Marthe, qui prit celles de Robert Cozal : M. H. pour lui, R. C. pour elle, et, pour tous les deux, 31 !… – quantième fatal de cette journée de deuil. Ils prirent l’engagement mutuel de s’écrire tous les matins, se répétèrent que leurs deux existences étaient nécessaires l’une à l’autre, arrachèrent de nouvelles larmes à des sources qu’ils auraient eu le droit de croire taries.

Enfin, Marthe Hamiet partit.

Par la croisée de sa maisonnette, dont il soulevai