Page:Courteline - Un client sérieux, 1912.djvu/101

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jour où M. Malbrough rentrera dans le château de ses pères.

Lui. — De l’esprit ? Le temps va changer. (Geste de Madame.) Il suffit. Tes insinuations en demi-teintes font ce qu’elles peuvent pour être blessantes, heureusement la sottise n’a pas de crocs. Ta perfidie me fait lever le cœur et ta niaiserie me fait lever les épaules ; voilà tout le fruit de tes peines. Là-dessus, tu vas me faire le plaisir de te taire, ou alors ça va se gâter. Je veux bien me borner, en principe, à remettre un goujat à sa place par une lettre plus qu’explicite, mais c’est à la condition, à la condition expresse, que la question sera tranchée et que je n’entendrai plus parler de lui. (Indigné, les bras jetés sur la poitrine.) Comment ! Voilà un galapiat, un traîneur de rapière en chambre, qui non seulement manquerait de respect à ma femme, mais viendrait par-dessus le marché mettre la zizanie chez moi ? Troubler la paix de mon ménage ? Oh ! mais non ! Oh ! mais n’en crois rien ! Donc, tu peux te le tenir pour dit : la moindre allusion à ce monsieur, la moindre ! c’est clair, n’est-ce pas ? et ce n’est plus une lettre qu’il recevrait de moi.

Elle. — Qu’est-ce qu’il recevrait ?

Lui, très catégorique. — Mon pied.

Elle. — Ton pied ?

Lui. — Mon pied en personne, si j’ose m’exprimer ainsi.

Elle, pouffant de rire. — Pfff.

Lui, qui saute sur son pardessus et l’endosse. — Veux-tu que j’y aille tout de suite ?

Elle, froidement. — Je t’en défie.

Lui, son chapeau sur la tête. — Ne le répète pas.

Elle. — Je t’en défie.

Lui. — Fais attention.

Elle. — Je t’en défie !