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PRINCIPE DES JUGEMENTS ANALYTIQUES.

[243] D’autre part, quel est, selon Kant, le fondement des jugements analytiques ? C’est tantôt le principe d’identité, tantôt le principe de contradiction, qu’il a tour à tour distingués et confondus. Dans la Principiorum primorum cognitionis metaphysicae nova dilucidatio [Nouvelle explication des premiers principes de la connaissance métaphysique] (1755), Kant considérait le principe d’identité, et non pas le principe de contradiction, comme le fondement de toutes les vérités, tant négatives qu’affirmatives, sous cette double forme : Ce qui est, est ; ce qui n’est pas, n’est pas. Dans l’Untersuchung über die Deutlichkeit der Grundsätze der natürlichen Theologie und der Moral [Recherche sur l’évidence des principes de la théologie naturelle et de la morale], III, § 3 (1764), Kant considérait le principe d’identité comme le fondement des jugements affirmatifs, et le principe de contradiction comme le fondement des jugements négatifs, et taxait même d’erreur ceux qui considèrent le second comme le principe unique de toutes les vérités. Dans la Critique, il n’admet plus qu’un « principe suprême de tous les jugements analytiques », c’est le principe de contradiction, qu’il formule comme suit : « A aucune chose ne convient un prédicat qui lui contredit », et il déclare expressément que, « quand un jugement est analytique, qu’il soit négatif ou affirmatif, sa vérité doit toujours pouvoir être suffisamment reconnue d’après le principe de contradiction » (B. 190). A vrai dire, on ne voit pas bien comment ce principe tout négatif peut servir de fondement à tous les jugements analytiques, « tant affirmatifs que négatifs ». Le type du jugement analytique affirmatif est, nous l’avons vu : « ab est a ». Or le principe de contradiction, tel que Kant le formule, nous interdit d’attribuer au sujet ab le prédicat non-a, ou le prédicat non-b ; mais il ne nous dit nullement quel prédicat nous pouvons ou devons lui attribuer.