Page:Crémazie - Œuvres complètes, 1882.djvu/315

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

317
journal du siège de paris.

tion devient excessivement tendue et nous pouvons nous attendre à voir la guerre civile ensanglanter les rues avant quarante-huit heures. Espérons que le bon sens public laissera dans l’isolement les meneurs de cette odieuse reprise des traditions terroristes de 93. Encore une manifestation. Celle-là est inoffensive. Quatre cents femmes se sont présentées à l’Hôtel de Ville, demandant à remplacer les hommes dans les ambulances. Il me semble que ces citoyennes n’ont pas tout à fait tort.

Samedi, 8 octobre. — Ce matin, brouillard et temps sombre. Depuis quatre heures, pluie torrentielle qui continue à tomber au moment où j’écris, huit heures et demie du soir. Depuis que nous sommes assiégés, le canon n’a jamais grondé aussi longtemps qu’aujourd’hui. Au nord et au midi, c’est un tonnerre continuel. Nous voici au vingt-deuxième jour de l’investissement, et les Prussiens ne sont pas encore parvenus à établir une batterie capable de bombarder, je ne dirai pas la capitale, mais seulement les forts. Les artilleurs de la marine sont des pointeurs de première force et chaque boulet lancé par eux démolit un canon ennemi. Les matelots du fort de Montrouge ont enlevé à l’abordage deux convois d’approvisionnements destinés à l’ennemi et tué plus de cent Allemands à coups de hache. N’est-ce pas bizarre que la marine soit la force la plus solide et la plus habile de toutes celles qui sont appelées à la défense de Paris ? La redoute élevée par les assiégeants dans le parc de Saint-Cloud et qui mena-