Page:Crépet - Charles Baudelaire 1906.djvu/158

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du travailleur le plus acharne, mais Baudelaire n’écrivait guère dans sa chambre, et la proximité de la gare de l’Ouest lui était fort commode, quand il voulait partir pour Honfleur, où M mc Aupick, avec laquelle il s’élait réconcilié dès la mort du général (i\ vivait dans une bourgeoise retraite.

Il allait à Honfleur, en toute saison, même au cœur de l’hiver, jouir d’un repos favorable au travail et surtout de la tendresse de sa mère qu’il n’avait jamais jamais cessé de chérir, du fond de l’âme. Quand elle l’eut perdu, M me Aupick se reportait avec attendrissement au temps où elle le possédait dans « sa chaumière » . Ce souvenir était le seul bonheur qui lui restât. Elle écrivait à son confident habituel, Asselineau :

« Je pense bien souvent à Mon cœur mis à nu et au moment où je rentrerai en possession de ces pages où je vivais avec lui, en le lisant. Mais nous sommes bien plus ensemble ici, dans cette solitude, qu’à Paris. Comme je l’aime et le regrette ici, tout à mon aise ! Je vous montrerai la place où, en étendant les bras devant le ciel et la mer, il m’a dit maintes et maintes fois : «Oh ! si je n’avais pas de dettes, comme je serais heureux \-à ! »

Les dettes 1 C’était là, en effet, la triste raison qui retenait ou rappelait son fils à Paris.

Il était entré dans la vie littéraire avec un passif de trente mille francs, mais ce chiffre s’était grossi sans cesse, chose inévitable puisqu’il n’avait gardé de son

(i) M. Féli Gautier a publié parmi ses Documents sur Baudelaire (Mercure de France, i5 janvier 1905), le testament du général Aupick qui, disons-le en passant, témoigne d’une âme noble et chrétienne. — Son beau-fils n’y est pas même nommé.