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LETTRE DE M. ANGE PECHMÉJA

Bucharest, 11-2S février 1866.

«J’ai été bien heureux, Monsieur, de la marque d’attention dont vous m’avez honoré par l’ intermédiaire de M. Malassis.

» S’il ne m’avait pas été donné jusqu’ici la satisfaction de me rencontrer avec vous (et c’était difficile, vu La direction que les circonstances m’ont imprimée , j’ai du moins le plaisir de vous connaître de longue date par des œuvres dont personne n’apprécie, mieux que moi peut-être, la haute valeur.

» Veuillez bien ne prendre ceci que pour l’exacte expression de mon sentiment. La jugement est d’autant plus désintéressé que ma manière de voir, à certains égards, ne s’accorde pas toujours avec la votre.

» J’ai lu et relu, entre autres, vos fleurs du mal et je ne connais pas d’œuvre contemporaine ou autre qui ait fait sur moi une impression plus forte que ces poèmes dont la variété se rallie dans la puissante unité de l’effet.

» Comme ces opéras qui, pour être goûtés pleinement, ont besoin de plusieurs auditions, votre livre m’a présenté à chaque reprise nouvelle, des figures inattendues qu’une première lecture ne me donnait pas.

» Serré dans une forme exquise, comme la fleur dans sa graine étroite, le sens de vos vers fait éclater, dans le cerveau du lecteur, la série des développements •que leur formule concise contenait en puissance. El c’est là, selon moi, ce qui fait surtout de votre livre