BALLADE
Or, n’est-il fleur, odour ne violette,
Arbre, esglantier, tant ait douçour en lui[1],
Beauté, bonté, ne chose tant parfaicte,
Homme, femme, tant soit blanc ne poli,
Crespé ne blont[2], fort, appert ne joli,
Saige ne foul, que Nature ait formé,
Qui à son temps ne soit viel et usé,
Et que la mort à sa fin ne le chace,
Et, se viel est, qu’il ne soit diffamé :
Vieillesce est fin, et jeunesce est en grace.
La fleur en may et son odeur délecte
Aux odorans, non pas jour et demi ;
En un moment vient li vens qui la guette ;
Cheoir la fait ou la couppe par mi[3] :
Arbres et gens passent leur temps ainsi ;
Riens estable[4] n’a Nature ordonné ;
Tout doit mourir ce qui a esté né.
Un povre acès de fièvre l’omme efface,
Ou aage viel, qui est déterminé[5] :
Viellesce est fin, et jeunesce est en grace.
Pour quoy fait donc dame, ne pucellette[6],
Si grant dangier de s’amour à ami,
Qui séchera, soubz le pié com l’erbette ?
C’est grant folour[7] ; que n’avons-nous mercy[8]
L’un de l’autre ? Quant tout sera pourry,