Page:Crépet - Les Poëtes français, t2, 1861.djvu/399

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JEAN-BAPTISTE CHASSIGNET


1578 — 1620



Un poëte qui fait penser au Racine des chœurs d’Esther et d’Athalie en même temps qu’au Jean-Baptiste Rousseau des odes, un poëte dont l’unique préoccupation semble avoir été l’idée de la mort, qui écrit k seize ans un volume entier sur le Mépris de la v’^e, qui, sans se môler à aucun des événements de son siècle, passe ses jours dans sa ville natale, et y meurt jeune, un poëte enfin exclusivement religieux et mélancolique, est presque un phénomène dans ce xvie siècle si remuant, si agité, si divers, si fécond en fortunes subites et incroyables, ce xvie siècle si vivant, où les plus belles inspirations poétiques nous paraissent puisées directement aux sources d’une existence abondante, joyeuse, remplie, et, par-dessus tout, éphémère et mondaine.

Si d’autres poètes du xvie siècle ont été, à de certains moments, des poêles religieux, ils l’ont été autrement que Chassignet. Que l’on no confonde pas l’esprit religieux avec l’esprit de parti. Ce n’est que trop souvent ce dernier qui anime les écrivains pendant les temps de luttes religieuses. L’esprit de parti peut produire de belles œuvres, mais des œuvres indignées, satiriques, violentes, sarcastiques. Autres et non moins belles seront les œuvres sorties du cœur d’un homme inspiré par le véritable, éternel et profond sentiment religieux. Dans ces dernières œuvres, ni indignation, ni violence, ni satire ; un souffle égal, harmonieux, un rhythme lent, une cadence réglée, pourainsidire, sur le mouvement d’un cœur apaisé, — soumis et pieux.

De là, il faut l’avouer, une monotonie qui est^presque toujours le défaut des poètes, même les plus grands, qui ont écrit sous cette inspiration. Cette monotonie, que l’on remarque chez les poètes véritablement religieux, a une double cause. Elle ne provient pas seulement