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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

du Duc de Muti d’Acqua-Sparta, sa sœur avait épousé le fils ainé du Connétable Colonne ; enfin toutes les alliances de leur famille étaient les plus illustres de la Ville et du Patrimoine de Saint-Pierre. Vous pouvez juger s’il était de la faction romaine in toto corde, vicieris et medulat, comme disait l’Abbé Phélippeaux d’Herbaut, qui parlait quelquefois latin comme vous voyez. Avant d’atteindre à la barette, il avait été Nonce apostolique en Portugal et à Madrid. Il était un des porporati zelanti les plus papables et les moins papifians, car il se maintenait dans une réserve impénétrable et continuelle. C’est justement là pourquoi la France ou l’Autriche n’auraient jamais eu l’idée d’entraver son exaltation, qui se trouva déterminée par un compromis fractionnaire après quarante-quatre jours de conclave. Il avait choisi le même nom que le Pape Innocent III, le plus illustre des Conti qui fût monté sur le Saint-Siège (en 1198). Il était profondément religieux, conciliant, affable, humble devant Dieu, bien qu’il eût conservé devant les hommes un grand air de haute noblesse, avec certains mouvemens de physionomie, qui dénotaient les traditions du laticlave et l’hérédité du patriciat romain. Il était d’une austérité rigoureuse envers lui-même ; il était pour les autres indulgent et doux comme un agnus Dei. Il aimait l’architecture et les arts libéraux. Enfin c’était un choix infiniment agréable à la majorité des Cardinaux, et c’était, du reste, uno Papa di tempo, valétudinaire et septuagénaire.

J’ai déjà dit comment tous les efforts de la faction