Page:Créquy - Souvenirs, tome 2.djvu/185

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

Oh ! les Financiers doivent se connaître en livrées, et du reste, monsieur le cocher, je n’entends pas que sur le pavé de Paris, et pour tenir tête à des personnages absolument sans conséquence, on aille culbuter mes équipages et faire écraser mes gens, ou tout au moins estropier mes chevaux. — Il est vrai que Madame n’a que douze chevaux ; et d’ailleurs j’ai l’habitude de ne jamais céder qu’à des Princes du sang ; ainsi je ne saurais convenir à Madame.

Il était parti furieux. Mme de Marsan l’avait pris à son service à la pleine satisfaction des deux parties contractantes ; et c’était lui qui poussait nos laquais à la révolte, en disant que nous étions déshonorantes, et que nous avions sûrement comploté d’avilir et mortifier tous les gens de livrée dont les maîtres avaient les honneurs du Louvre… On n’a jamais vu scène de comédie pareille ! et si ce n’avait été la crainte que nous les fissions mettre au Fort-l’Évêque, ils nous auraient certainement abandonnées là, c’est-à-dire sur le grand chemin.

Leur exaspération provenait particulièrement de ce qu’ils avaient eu l’humiliation de voir passer avant eux les domestiques de M. de Pont-de-Vesle, lequel était un bourgeois, disaient-ils avec un air méprisant. Cet orgueilleux cocher, qui s’appelait M. Girard, en avait fait le sujet d’une lettre qu’il écrivit à mon fils en forme de réquisitoire, où j’étais prévenue d’avoir compromis l’honneur de la famille. Au milieu de quatre pages de récriminations et de représentations saugrenues, il y disait notamment que le cimier des armes de Créquy ayant la prérogative d’être une couronne à fermoirs, un si beau privi-