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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

innocente occupation. La Spinaverde m’assurait continuellement que j’avais toujours raison, que tout le monde était fait pour m’obéir, et que ceux qui ne m’obéissaient pas assez vite ou assez bien, méritaient toute sorte de punitions.

« Un soir, il arriva que toutes mes femmes me quittèrent l’une après l’autre ; je me vis sur le point d’être réduite à me déshabiller toute seule ! et j’en pleurais de rage. — Chère et douce Princesse, essuyez vos beaux yeux, me dit ma gouvernante, je vous déshabillerai ce soir, et je vous amènerai demain cinq ou six femmes de chambre dont j’espèce que vous serez plus satisfaite.

« Le lendemain à mon réveil, la Spinaverde me présenta six grandes personnes très-belles. Leur vue me causa je ne sais quelle émotion que je ne saurais vous expliquer. Leur physionomie courageuse, énergique et passionnée m’imposa d’abord une espèce de contrainte, mais je ne tardai pas à me familiariser avec elles. Je les embrassai les unes après les autres, et je leur promis bien qu’elles ne seraient jamais ni grondées ni battues. En effet, soit qu’elles fissent quelques gaucheries en me déshabillant, ou qu’elles osassent me désobéir, je n’avais pas le courage de m’en fâcher.

« — Mais, Madame, dis-je alors à la Princesse, ces grandes personnes étaient peut-être des garçons ?

« La Princesse me répondit avec un ton de di-