Page:Créquy - Souvenirs, tome 7.djvu/133

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
126
SOUVENIRS

guisés en aides-de-camp du général La Fayette, s’étaient présentés à la geôle avec un ordre du comité des Recherches, où les noms et la date avaient été grattés et remplacés fort obligeamment pour ce pauvre condamné. Ils le trouvèrent (M. de Savardin) qui soupait assez paisiblement. Ils se mirent à l’injurier et finirent par l’emmener dans la rue où ils le lâchèrent en lui disant de s’aller cacher le mieux possible. Le comité des Recherches en fut dans une furieuse colère, et fit afficher son signalement naturel, où l’on disait notamment qu’il avait un gilet vert avec une gance d’acier à son chapeau, ce qui fit rire tout le monde.

Vous pouvez bien préjuger que dans la situation d’inquiétude et d’isolement où se trouvait la famille royale aux Tuileries, je ne manquais par d’aller y faire une cour assidue. — Vous venez saluer des ruines, me dit la Reine, après le 20 juin, et je me souvient qu’elle me fit signe de ne rien dire en présence d’une de ses femmes, appelée Mme Campan, qui venait d’entrer pour lui présenter quelque chose, et je crois me rappeler que c’était un livre sur un plateau.

Quand celle-ci fut sortie du cabinet, je dit à cette malheureuse princesse : — Hélas ! Madame, est-ce que la Reine s’en défie ?…

— Ce n’est pas seulement de la défiance, répondit-elle, c’est de la terreur. Elle est en correspondance avec Brissot de Varville et Latouche-Treville, elle écrit quelquefois à Barnave ; — Elle a ri le 6 octobre, poursuivit la Reine, avec une expression du regard et de la voix qui faisait frémir ; — mais on a décidé