Page:Créquy - Souvenirs, tome 7.djvu/166

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
159
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

tout le monde. Tous les honnêtes gens venaient le supplier d’être leur arbitre, et il accommodait si bien tous les procès, qu’on l’avait surnommé le fléau des procureurs. Il avait reçu je ne sais combien de legs assez considérables ; mais, comme il ne manquait jamais de remettre la valeur d’un legs aux parens du testateur, on avait fini par ne lui léguer autre chose que des remerciemens, ce qui l’arrangeait beaucoup mieux.

Il s’était soulevé entre ma belle-fille et la Maréchale du Muy, veuve de son oncle, et pour la succession de ce Ministre, une contestation dans laquelle on entrevoyait le germe d’un procès : Mme votre mère s’en désespérait ; mais elle était excitée par ses gens d’affaires à ne rien céder, et c’était pour ne pas abandonner les intérêts de son fils, à ce qu’ils disaient. Mais ce qu’elle me disait avec une sorte d’embarras, comme celui d’un malade qui demanderait à son médecin la permission d’user d’un remède de bonne femme, c’est qu’elle aurait eu grande envie de proposer à la Maréchale du Muy de s’en rapporter à l’arbitrage de M. de Létang ? Celle-ci finit par y consentir en dépit de l’avocat Siméon qui lui conseillait de n’en rien faire, et je m’en allai trouver M. de Létang, pour le prier d’examiner le testament, les consultations et autres paperasses, ce qui ne fut pour lui qu’une affaire de quarante-huit heures. Il me répondit que personne ne trouverait son compte à poursuivre et soutenir un pareil procès, à moins que ce ne fussent les procureurs et les avocats des parties plaidantes, attendu que les immeubles qu’on voulait réclamer au nom