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SOUVENIRS

sept cent mille livres de rente accordées à Messieurs de Talleyrand. Il n’aurait pas été difficile d’obtenir l’aveu du premier Ordre et l’autorisation de N. S. P. le Pape, à l’effet d’aliéner au profit de l’État une partie des biens du Clergé ; ce que le Roi Louis XIV avait déjà fait, à la fin de son règne, aux dépens de la congrégation des Célestins, et ce qui s’était opéré sans commotion ni contestation. Mais ces deux moyens auraient été trop simples et trop vulgaires pour satisfaire à l’arrogance de M. Necker et pour suffire à son ambition. Il voulait dominer la France en la régissant par les finances ; et quand il devait produire sa colonne de recette, il avait toujours soin de la combiner par accolades et de la compliquer avec des anticipations prévues, des remboursemens douteux, des rentrées suspendues et autres nébulosités auxquelles on ne comprenait rien du tout, et qui donnaient de l’épouvante à tout le monde à commencer par MM. les Conseillers d’État au comité des finances, et ceci n’était pas la faute du Roi.

Il est assez connu que la première chose que firent les députés de la Noblesse et du Clergé à l’Assemblée nationale, ce fut l’abandon de leurs priviléges pécuniaires, avec la proposition de contribuer à tous les besoins de l’État ; on leur répondit qu’il était trop tard. On voulait arriver, par la perturbation générale de la France, à ce qu’on osait appeler sa régénération, et la situation des finances était purement et simplement un prétexte. Les astucieux comptes-rendus et les ennuyeux rapports de M. Necker n’avaient pas été plus satisfaisans pour l’Assemblée des Notables que pour le comité des finances. On criait de partout : — Les États-généraux ! les