Page:Créquy - Souvenirs, tome 9.djvu/177

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berg, disgraciée de la cour de France et mécontente de l’inconduite d’Alphonse de Crequy, se retira dans ses états en Empire, près de Vienne. Ce fut à cette époque, 1737, que je naquis et fus baptisé.

Ma mère repassa en France aux ordres de Louis XV, vers l’année 1748 ou 1749 Alphonse de Crequy avoit été aux portes de la mort ; et comme il avoit reçu la dot de ma mére qui absorboit de beaucoup tout ce qu’il possédoit, en réparation il me declara son unique héritier par son testament. Il fut fait ensuite un autre acte devant notaire, à Paris, qui porte mon signalement par la singularité d’une empreinte que la nature m’avoit imprimée ineffaçablement. Par cet acte, je suis pensionné par Alphonse de Crequy pour mon éducation sous la main de l’abbé Goudin d’Arostey, résidant lors a Paris. L’on me pourvut ensuite, par le même acte, d’un subrogé tuteur qui fut Blanchefort, père de l’actuel, mon persécuteur, qui se dit Crequy,

Ma mère fut placée par ordre du roi dans une maison de retraite : dès ce moment je la perdis de vue, je la crois vivante, n’ayant aucune preuve de sa mort.

Alphonse de Crequy ayant vécu concubinairement avec une demoiselle précédemment, pendant nombre d’années, continua ses égaremens avec elle, qui le sollicitait à me hair et persécuter.

La persuasion où était Alphonse que je n’étais pas son fils, mais celui de Louis XV, l’instiguoit à me faire moine ; je resistai ; on me mit dans un couvent pour m’y contraindre par violence ; on vouloit au moins que je fusse ecclésiastique, et l’on me tonsura, rapportant là toute mon éducation. Je m’étois échappé des mains d’Arostey ; je fuis également du cachot monacal. J’avois alors environ vingt ans. Enfin, pour me soustraire à mes persécuteurs, je voyageai chez l’étranger, où j’appris la mort d’Alphonse de Crequy, décédé en Poitou dans sa terre, en 1771 : je rentrai en France, où j’appris qu’il avoit testé de nouveau ; je me procurai son extrait mortuaire et copie de son testament, et vins trouver Blanchefort le fils, qui avoit succédé à son père dans l’administration de mes biens pupillaires.

Ce testament portoit : que le testateur avoit un fils par le monde, à qui appartenoient et il laissoit tous ses biens ; en cas qu’il reparût, ils lui seroient remis, et que où il ne reparoîtroit, audit Blanchefort fils. Ce testament portoit de plus que l’on re-