Page:Cregut - Le Concile de Clermont en 1095 et la première croisade.djvu/12

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événement de l’ère chrétienne ; elles ont été en outre le triomphe de la puissance morale, parvenant à soulever l’Europe et à l’entraîner au nom d’une idée. Pour la première fois, on sentit palpiter une âme sous ces gigantesques déplacements de nations. L’empire romain s’était annexé le monde, en vue d’un intérêt matériel ; Fustel de Coulange a démontré cette vérité. Les barbares envahirent à leur tour l’empire romain, pour assurer l’existence physique de leurs tribus. Il était réservé à la chevalerie chrétienne d’opérer une invasion, sous l’impulsion exclusive d’une croyance, la plus sublime qui fut jamais, suivant le mot de Voltaire.

Or, c’est en Auvergne, c’est à Clermont qu’a pris naissance le mouvement des Croisades. À ce titre, la réputation de notre cité est immortelle ; son nom est désormais impérissable.

Jusque-là son histoire avait été modeste. Sans doute, en comptant parmi ses enfants, de naissance ou d’adoption, deux écrivains qui sont parmi les sommets lumineux de la chronique : Sidoine Apollinaire et Grégoire de Tours, elle devait à juste titre attirer l’attention des érudits ; mais perdue dans l’unité administrative de la Gaule et victime des dissensions franques, la ville arverne dissimulait son existence dans une pénombre discrète.

Tout à coup elle émerge avec éclat.

1095 est une de ces dates qui fixent l’illustration. Rappeler ce fait, dans l’année du huitième centenaire, n’est-ce pas obéir à un sentiment de piété filiale ?

Nous assistons d’ailleurs à une série d’évocations :

Hier, c’était Jeanne d’Arc éclairant, de sa virginale physionomie, le ciel de la France ;

Aujourd’hui, c’est Urbain, c’est Godefroy de Bouillon, surgissant d’un injuste oubli et dessinant sur l’horizon leur héroïque stature.