Page:Crevel – Discours aux ouvriers de Boulogne, paru dans la Commune, 1935.djvu/3

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Vous savez comment, face aux menaces de fascisme et de guerre, à vos côtés se sont dressés des savants tels que les professeurs Prenant, Rivet, Langevin, des écrivains tels que Romain Rolland, Henri Barbusse, André Gide, André Malraux, des peintres tels que Signac, des architectes, des médecins, des étudiants.

En effet, dans leur laboratoire, dans leurs bibliothèques, dans leurs ateliers, les plus clairvoyants de ceux qui ont pour métier de faire des expériences, de faire des livres ou des tableaux, ont compris que pour eux, pour leurs recherches, la partie allait se jouer dans la rue.

L’essor culturel en Union Soviétique, d’une part, et, d’autre part, les persécutions contre tous ceux qui, malgré les Hitler, les Gœring, les Mussolini, les Gil Robles, les Lerroux, n’ont pas accepté de renoncer au droit de penser, n’en était-ce point assez, camarades, pour prouver aux intellectuels que leur sort est lié au vôtre ?

Indissolublement lié.

Aujourd’hui 1er mai 1935, le gouvernement du grand Flandin a osé ce dont, l’année dernière, cette vieille ordure de Tournesuez n’aurait pas eu l’audace.

Toute manifestation ouvrière a été interdite. La peur rend féroce. L’unité d’action effraie ces messieurs de la bourgeoisie et les ministres qui leur servent de valets. Leurs petits cœurs de gros actionnaires et de présidents de conseils d’administration peuvent trembler sous leurs portefeuilles, puisque les organisations unitaires et confédérées participeront en commun à deux grands meetings centraux à Paris (à Huyghens et à Japy), à cinquante réunions en banlieue et à soixante-six meetings en province.

La garde mobile, la flicaille chiappiste peuvent se répandre par les places, les boulevards, les avenues, interdits aux cortèges des travailleurs. Le bloc des travailleurs ne manquera point de riposter, de mettre un terme aux méfaits, aux crimes dont le capitalisme, jamais, n’hésite à se rendre coupable pour prolonger un désordre dont il est le fauteur et le profiteur.

Un intellectuel qui a conscience de lui-même, du monde où il vit, aujourd’hui, doit forcément aller, coude à coude, avec les exploités qui ont pris la plus claire conscience de classe.

Ce sont toujours les mêmes, c’est toujours la même