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d’atomes plus ou moins subtils, plus ou moins lourds, depuis le feu jusqu’à la terre. L’âme est un feu subtil qui anime le corps. Il y a de l’âme dans l’univers entier. Les dieux de la mythologie n’existent pas, non plus que l’Esprit ordonnateur d’Anaxagore ou le Dieu-Providence de Socrate. Mais on peut admettre que des âmes formées d’atomes très subtils et par conséquent supérieures à celles de l’homme, des εἴδωλα, qu’on appellera, si l’on veut, des dieux, sont répandus dans l’espace et agissent même parfois sur notre destinée[1]. Démocrite revenait par ce détour à des idées pratiques assez voisines de celles de la foule. Il croyait même, sauf quelques réserves, aux songes, à la divination par l’examen des entrailles des victimes, à l’inspiration sacrée des poètes.

En morale, il prêchait, comme Xénophon et comme presque toute la Grèce, la recherche du bonheur par la culture des facultés raisonnables, par la modération dans les désirs, par la préférence donnée à l’âme sur le corps[2]. Il n’aime pas le mariage, peu favorable à la tranquillité du sage[3]. En revanche, il vante les amitiés intelligentes et honnêtes[4]. Il ne veut pas que chacun se renferme trop étroitement dans sa patrie[5], mais il reconnaît hautement l'importance de la prospérité sociale pour la prospérité de l’individu[6]. Ce qu’il demande surtout aux gouvernements, c’est de respecter la liberté des personnes[7]. Tout cela est fin, quelquefois même élevé ; on reconnaît à chaque ligne, chez

  1. Cf. Plutarque, P. Emile, ch. i ; Disp. des oracles, ch. vii ; Cicéron, Nat. Deor., I, 12, 29 ; etc. ; et surtout Suxtus Empiricus, Adv. Mathem., IX, 19.
  2. Frag. mor., 1-6 ; etc.
  3. Ibid., 184-188.
  4. Ibid., 163 ; etc.
  5. Ibid., 225.
  6. Ibid., 212.
  7. Ibid., 211.