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LE ROMAN : ACHILLE TATIOS, CHARITON


phiste de profession, il ne cherche que l’occasion de nous montrer son savoir-faire ; il abonde en descriptions, en discours, en lettres, en plaidoyers, en lieux communs ; morceaux de rhétorique qu’il soigne avec prédilection. Il a dû à cela d’être considéré dans les siècles suivants comme un écrivain ; on le citait à Byzance parmi les modèles du style à la fois élégant et simple[1], malgré des fautes de langue qui avaient cessé d’être remarquées ; et ces qualités faisaient passer sur la liberté de ses peintures et de son langage[2].

Chariton, auteur des Aventures de Chæréas et de Callirrhoé (Τὰ περὶ ϰαὶ Χαιρέαν ϰαὶ Καλλιῤῥόην (Ta peri Xairean kai Kallirrhoên)) se donne lui-même, au début de son récit, pour originaire d’Aphrodisias en Carie et pour secrétaire du rhéteur Athénagoras[3]. Personne autre ne nous renseigne ni sur sa personne ni sur son temps. Lui aussi imite Héliodore et, de plus, Xénophon d’Éphèse[4]. Bien qu’il vise à l’élégance et à l’atticisme, la médiocrité de son style, pourtant soigné, semble autoriser à le considérer comme le dernier des romanciers de la période sophistique. Son roman touche à l’histoire par certains détails : Callirrhoé est fille du syracusain Hermocrate, qui combattit les Athéniens en 413 ; Chæréas est fils d’Ariston, d’abord antagoniste d’Hermocrate, puis réconcilié avec lui par le mariage de leurs enfants. Le drame est censé se passer après la guerre du Péloponnèse, au commencement du ive siècle. Une

  1. Photius, cod. 87 : Καὶ λέξει ϰαὶ συνήϰῃ δοϰεῖν διαπρέπειν,.. ἀφοριστιϰαὶ τε ϰαὶ σαφεῖς ϰαὶ τὸ ἡδὺ φέρουσαι ἁι πλεῖσται περίοδοι ϰαὶ τὴν ἀϰοὴν τῷ ἤχῳ λειαίνουσαι. (Kai lexei kai sunthêkê dokei diaprepein,.. aphoristikai te kai sapheis kai to hêdu pherousai hai pleistai periodoi kai tên akoên tô êchô leiainousai).
  2. Ibid. τὸ λίαν ὑπέραισχρον ϰαὶ ἀϰάθαρτον τῶν γνωμῶν (to lian huperaischron kai akatharton tôn gnômôn).
  3. Sur Chariton, voir surtout E. Rohde, Der Griech. Roman, p. 408 et suiv. ; il considère cette indication comme allégorique, sans raisons bien solides, à mon avis.
  4. E. Rohde, p. 489, note 3 et p. 492. Certaines ressemblances avec Achille Tatios ne permettent pas de déterminer lequel a imité l’autre.