Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/1046

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
1028
CHAP. VIII. — LA FIN DE L’HELLÉNISME


étant à des degrés divers ou pythagoriciens, ou platoniciens purs, ou aristotéliciens. Simples nuances, d’ailleurs, qui s’effacent par l’éloignement.

Le plus intéressant de ces maîtres est une femme, la célèbre Hypatie[1]. Son père, Théon, philosophe lui-même et géomètre, lui transmit sa science avec ses vertus. Devenue, comme lui, mathématicienne et philosophe, elle tint école à Alexandrie, dès la fin du ive siècle (probablement, et, dans les premières années du ve. Aussi belle que savante et digne de respect, elle exerçait une influence profonde sur ses nombreux disciples, comme l’attestent encore plusieurs lettres de Synésios, qui fut le plus illustre d’entre eux[2]. Elle commentait Platon et Aristote, tout en enseignant aussi l’astronomie. Le préfet d’Égypte Oreste lui témoignait, dit-on, la plus grande faveur. Ces succès même la perdirent. La populace fanatique d’Alexandrie, excitée par les moines, en vint à considérer la maison d’Hypatie comme le rendez-vous des ennemis de Dieu. On ne sait au juste quel fut en cela le rôle du patriarche Cyrille. Toujours est-il qu’un jour de l’année 415, une foule sauvage se rua sur cette maison, en arracha la malheureuse et noble femme, et la déchira ignominieusement sans qu’aucune autorité intervînt à temps pour la sauver. Les seuls écrits d’elle que mentionne Suidas se rapportaient aux mathématiques ; il ne nous en est rien resté ; mais il n’est pas douteux que son influence philosophique et littéraire ne se fasse sentir chez Synésios, dont nous parlerons plus loin.

Quelques années après la mort d’Hypatie, nous voyons

  1. Suidas, Ὑπατία (Hypatia), deux notices, dont la seconde empruntée à la Vie d’Isidore, de Damaskios. Socrate, Hist. ecclés., VII, 15.
  2. Lettres 4, 10, 15, 16, 80, 124, 132. Synésios s’adresse toujours à elle avec un ton de vénération respectueuse et de docilité, même une fois devenu évêque. La lettre 16, où il parle de la mort de ses fils, est postérieure à son épiscopat (cf. ep. 105, § 249).