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CHAP. IV. — SOPHISTIQUE SOUS LES ANTONINS

Outre les discours, les sophistes cultivaient un certain nombre de genres littéraires qui servaient d’exercices aux écoliers dans les écoles, et dont les maîtres se plaisaient à donner des modèles. Ainsi les lettres et les descriptions. Il suffit de les indiquer ici ; nous aurons l’occasion d’y revenir plus loin, à propos de quelques écrivains qui s’y sont fait une notoriété.

La faveur que les hommes de ce temps accordaient à ce qui leur paraissait être l’éloquence ne se marquait pas seulement par leur empressement à applaudir les orateurs à la mode. La sophistique fut considérée par eux comme une des choses nécessaires à la vie sociale, et ils prirent leurs mesures pour en assurer le développement[1]. Les premières écoles qui acquirent une large réputation lors de la renaissance de l’éloquence grecque, celles des Nikétès, des Isée, des Scopélien, semblent avoir été des écoles purement privées. Mais bientôt les villes voulurent en avoir de publiques, avec des professeurs salariés. Faute de documents précis sur ce point, nous en sommes réduits à quelques faits incomplètement éclaircis. Nous savons par exemple qu’Antonin le Pieux accorda aux rhéteurs dans les provinces, non seulement des privilèges, mais des traitements, probablement payés sur les revenus des villes et complétés, en cas d’insuffisance, sur les fonds du fisc impérial[2]. C’est ainsi sans doute que Lollianos, comme nous l’avons vu plus haut, occupa le premier la chaire de sophistique d’Athènes[3]. Un peu plus tard, en 176, Marc-Aurèle créa, dans la

  1. Les Sophistes en renom se faisaient payer fort cher. Philostrate (V. Soph., II, 23, 2) nous apprend que Damianos d’Éphèse paya dix mille francs à Aristide et autant à Adrien de Tyr pour suivre leurs leçons.
  2. Jul. Capitol., Anton. Pius, II, 3. Voir Hertzberg, Hist. de la Grèce sous la dom. rom., trad. Bouché-Leclercq, t. II, p. 364, note 2.
  3. Chaire municipale, qui subsista ensuite à côté de la chaire impériale ; on l’appelait ὁ πολιτικὸς θρόνος (Phil., V. Soph., II, 20, où l’on voit que les honoraires étaient d’un talent.)