Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/740

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
722
CHAP. V. — HELLÉNISME ET CHRISTIANISME

ὀνομάτων τεσσαράκοντα ὀκτώ)[1]. Mais, comme il le dit expressément, ce n’était pas qu’il attachât la moindre valeur au purisme affecté des atticistes contemporains[2] ; il trouvait même ridicule qu’on reprît ceux qui parlaient incorrectement[3]. Son but avait été tout autre : il s’était proposé seulement d’établir le sens exact des mots anciens, qu’il voyait méconnu souvent autour de lui.

Par cette quantité d’écrits variés, Galien se révèle comme un esprit singulièrement actif. Toutefois, si on voulait le traiter en philosophe proprement dit et lui demander ses opinions sur les points de doctrine essentiels, on risquerait d’aboutir à un mécompte. Homme de savoir avant tout, c’est sous cet aspect qu’il convient de l’apprécier. En métaphysique, en théologie, en morale, en logique même, on ne peut pas dire qu’il ait rien approfondi. Les idées qu’il exprime sur ces sujets nous montrent en lui un éclectique, qui s’appuie de préférence sur Aristote, en mêlant à ses opinions celles de Platon et des Stoïciens, et en modifiant tout cela à sa manière[4]. Au fond, si l’on excepte quelques affirmations qui lui sont chères, il a très peu le goût de dogmatiser. En face des questions difficiles, sur lesquelles les philosophes disputent, lui s’arrête volontiers, avoue son ignorance et ne se croit pas autorisé à conclure, faute de preuves.

Mais où se montre la vigueur et la supériorité de son intelligence, c’est dans ce qu’on peut appeler sa philo-

  1. M. ouvr. c. 17.
  2. Sur l’ordre de ses ouvrages, c. 5.
  3. Ibidem. Il mentionne son écrit Πρὸς τούς ἐπιτιμῶντας τοῖς σολοικίζουσι τῇ φωνῇ.
  4. Sur la philosophie de Galien, consulter Zeller (Phil. d. Griech., t. IV, p. 893 et suiv., qui a eu le tort d’ailleurs de ne pas dégager des œuvres de Galien sa philosophie de la science, la seule qui nous le montre tout entier. — En français, E. Chauvet, La psychologie de Galien, Caen, 1867, et du même La théologie de Galien, Caen, 1873.