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ORIGINES DE LA LITTÉRATURE CHRÉTIENNE

Pasteur d’Hermas, présentent naturellement un intérêt très supérieur, du moins pour qui cherche plutôt des âmes que des dogmes : on y sent vivre tous les sentiments et toutes les passions, les espérances, les craintes, le mysticisme ardent et naïf, qui s’agitent alors dans la conscience chrétienne. Mais rien ne vaut, pour la nouveauté de l’inspiration, pour le charme, la beauté morale, les récits variés dont le type le plus achevé se trouve dans les Évangiles. C’est là que le christianisme apparaît vraiment dans sa grâce primitive, qui a conquis le monde.

Si l’on réunit par la pensée toutes ces formes diverses, il est possible d’en dégager certains traits dans lesquels se résume ce qu’on peut appeler la nouveauté littéraire du christianisme.

D’abord quelque chose qu’on est fort en peine de définir et qui est proprement « évangélique ». Une sorte de puissance douce, faite de simplicité populaire, de certitude pieuse, de détachement et de tendresse, associés dans une vision permanente d’idéal. Germe fécond qui est la vertu même du christianisme, son élément divin, celui qui procède directement de son fondateur. Une fois la période primitive passée, quand le christianisme grec deviendra raisonneur et théologien, cet élément se cachera souvent, dans les œuvres littéraires, sous la véhémence des passions et sous le jeu subtil des idées ; rarement néanmoins, il disparaîtra tout à fait : et ce qui en restera visible ou sensible sera justement la goutte précieuse de myrrhe que le christianisme aura versée dans le rationalisme antique.

Mais, par ses antécédents, le christianisme est juif, et, en conséquence, il jettera aussi dans le courant de la pensée grecque bien des éléments de provenance judaïque. On peut en distinguer surtout trois, dont l’importance sera capitale. En premier lieu, un élément popu-