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CHAP. V. — HELLÉNISME ET CHRISTIANISME

laire, auquel les évangiles donnent une autorité durable, et dont l’influence se fera sentir chez tous les écrivains grecs chrétiens. Ensuite, un élément rabbinique : car plusieurs des apôtres, et Paul principalement, ont subi fortement l’empreinte de la science des docteurs juifs ; et de là, une sorte de dialectique particulière, une méthode didactique qui n’est pas grecque, et qui passera en partie des épîtres à toute la littérature chrétienne. En troisième lieu, un élément prophétique emprunté à l’Ancien Testament : images hardies, brusquerie des tours, âpreté du ton, comparaisons et paraboles, parallélisme de la phrase, expressions violentes ou lyriques, transformation de la prose en une sorte de poésie par l’oubli ou le mépris des qualités rationnelles, sacrifiées aux formes de l’inspiration.

Ces éléments nouveaux, mis en œuvre par des hommes de talent, vont apporter un supplément de force à l’art hellénique déclinant. Mais ils étaient, par leur nature, trop différents de ceux dont cet art était fait peur s’y associer harmonieusement. Il y aura donc invasion plutôt que fusion intime ; et de cette perturbation puissante, nous verrons peut-être sortir quelques grandes œuvres, mais non des œuvres achevées.


C’est par le genre apologétique que s’établit, dans le premier tiers du second siècle, le contact entre la littérature chrétienne et l’hellénisme^^1. Les apologistes chrétiens sont presque tous des hommes sortis des écoles grecques. Plus ou moins initiés à la philosophie et même à la rhétorique, dans leur jeunesse du moins, ils gardent, sous les habitudes nouvelles de leur pensée, quelque