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CHAP. VII. — L’ORIENT GREC AU IVe SIÈCLE

là un essor littéraire vraiment remarquable, bien que l’influence du goût sophistique s’y fasse trop sentir.

Toutefois, dès le siècle suivant, cet essor prendra fin, et le byzantinisme va commencer d’apparaître. En y regardant de près, on en découvre déjà les germes dans la littérature du ive siècle.

D’abord le régime politique auquel l’empire est alors soumis est essentiellement contraire au libre mouvement des esprits. Ce régime est un despotisme administratif qui fait tout aboutir au maître. La liberté religieuse ou la persécution, la prédominance de telle ou telle doctrine sont choses qui dépendent en grande partie de sa volonté. Comment, dans ces conditions, l’esprit d’intrigue ne l’emporterait-il pas sur le goût de la libre discussion ? Les païens ne comptent que sur l’empereur pour les défendre, s’il est païen lui-même comme Julien, ou pour les ménager, s’il est chrétien, mais politique. Les évêques, de leur côté, agissent à la cour, cherchent à s’y faire des appuis, trop souvent à y former des cabales. Théophile d’Alexandrie, plus habile que Chrysostome, est plus puissant que lui à Constantinople et réussit à l’expulser. Toute l’éloquence du monde est plus faible que l’influence d’une femme qui gouverne la volonté d’Arcadius. Cette soumission nécessaire de tous à un homme, qui est lui-même bien souvent le jouet des intrigues ou l’instrument des factions, c’est déjà un des traits caractéristiques du byzantinisme.

En voici un second, non moins frappant. Si l’on excepte les quelques années du règne de Julien, le christianisme devient tellement le maître dans cette société qu’il y absorbe tout. Sous les empereurs chrétiens, les orateurs païens sont réduits au silence ; tout au plus peuvent-ils plaider indirectement pour la liberté de conscience, à condition que le plaidoyer se dissimule sous l’éloge. Et non seulement il n’y a bientôt plus de résistance ouverte,