Page:Cros - Le Collier de griffes, 1908.djvu/187

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J’allai trouver Chopin et lui demandai :

« Vous avez beaucoup joué du piano dans le monde. Quelle est la musique qui plaît le plus aux femmes ? »

Il me répondit sans hésiter. : « La Rêverie de Rosellen. »

— Quarante mille francs, Si vous voulez m’enseigner à jouer parfaitement cette rêverie.

Chopin, ridiculement impratique, se récusa et me recommanda M. K***, un de ses élèves, comme plus fort que lui- même (ce qui était reste vrai). M. K*** accepta les quarante mille francs, et, probe, m’apprit uniquement à jouer la Rêverie de Rosellen.

J’étais armé de ce côté.

J’allai trouver Musset et lui demandai : « Quelle est la poésie qui plaît le plus aux femmes ? »

Musset posa l’index sur le sourcil et me dit : « L’Acrostiche. »

— Voici cinquante mille francs, apprenez-moi l’Acrostiche.

Musset, bohème indécrottable, ne comprit pas que j’étais sa providence et me renvoya à M. W*** (je ne veux pas révéler son nom), élève que je trouve bien plus fort que son maître.

W*** prit les cinquante mille francs et me fit une exquise collection d’acrostiches, sur tous les noms du martyrologe féminin. Chaque nom avait trois versions, blonde, brune et châtaine. Il y eut en outre promesse