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Page:Cros - Le Collier de griffes, 1908.djvu/194

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est tous deux face à face, après la distraction ou le sommeil, dans des pays à parfums nouveaux. »

Je m’étais fait faire la phrase par mon ami le poète W***.

Nous arrivons, elle comme un oiseau mouillé, moi ravi du succès initial de mes recherches. Car, sans me laisser entraîner à la vanité romanesque de cet enlèvement, j’avais durant tout le voyage, en rassurant la pauvre jeune fille effarouchée, adroitement appliqué entre sa dixième et sa onzième côte un cardiographe à fonctionnement prolongé si exact que M. le Docteur Maret, à qui j’en dois la description idéale se l’était refusé par économie.

Puis, une voiture nous prit à la gare. Terreur, embarras, ivresse inquiète de la demoiselle. Faiblement repoussés, mes embrassements permettaient au cardiographe d’enregistrer les expressions viscérales de la situation.

Et dans le délicieux boudoir où, mettant ses mains sur ses yeux, elle se reprochait sa rupture définitive avec les exigences de la morale et de l’opinion, je pus heureusement procéder à la détermination exacte (le moment était d’absolue importance) du poids de son corps. Voici comment :

Elle s’était laissée aller sur un sofa, perdue en ses pensées. M’arrêtant, ému, ravi de la contempler, je pressai du talon un bouton de sonnerie électrique ménagé sous le tapis, et, à côté, dans un cabinet secret,