Page:Curie - Œuvres de Pierre Curie, 1908.djvu/371

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

spéciale à la suite de la nôtre. M. Demarçay a trouvé dans le spectre une raie qui ne semble due à aucun élément connu. Cette raie, à peine visible avec le chlorure 60 fois plus actif que l’uranium, est devenue notable avec le chlorure enrichi par fractionnement jusqu’à l’activité de 900 fois l’uranium. L’intensité de cette raie augmente donc en même temps que la radioactivité, et c’est là, pensons-nous, une raison très sérieuse pour l’attribuer à la partie radioactive de notre substance.


Les diverses raisons que nous venons d’énumérer nous portent à croire que la nouvelle substance radioactive renferme un élément nouveau, auquel nous proposons de donner le nom de radium.

Nous avons déterminé le poids atomique de notre baryum actif, en dosant le chlore dans le chlorure anhydre. Nous avons trouvé des nombres qui diffèrent fort peu de ceux obtenus parallèlement avec le chlorure de baryum inactif ; cependant les nombres pour le baryum actif sont toujours un peu plus forts, mais la différence est de l’ordre de grandeur des erreurs d’expérience.

La nouvelle substance radioactive renferme certainement une très forte proportion de baryum ; malgré cela, la radioactivité est considérable. La radioactivité du radium doit donc être énorme.

L’uranium, le thorium, le polonium, le radium et leurs composés rendent l’air conducteur de l’électricité et agissent photographiquement sur les plaques sensibles. À ces deux points de vue, le polonium et le radium sont considérablement plus actifs que l’uranium et le thorium. Sur les plaques photographiques on obtient de bonnes impressions avec le radium et le polonium en une demi-minute de pose ; il faut plusieurs heures pour obtenir le même résultat avec l’uranium et le thorium.

Les rayons émis par les composés du polonium et du radium rendent fluorescent le platinocyanure de baryum ; leur action, à ce point de vue, est analogue à celle des rayons de Röntgen, mais considérablement plus faible. Pour faire l’expérience, on pose sur la substance active une feuille très mince d’aluminium, sur laquelle est étalée une couche mince de platinocyanure de baryum ; dans l’obscurité, le platinocyanure apparaît faiblement lumineux en face de la substance active.

On réalise ainsi une source de lumière, à vrai dire très faible,