Page:Curwood - Le Piège d’or, trad. Postif et Gruyer, 1930.djvu/69

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chaque mot qu’il articulait semblait lui coûter un gros effort. Pourquoi causer ?

— Je désirais te demander comment il se fait que tu as abattu un homme dans la région du lac de Dieu. »

À peine eut-il parlé que Philip regretta ses paroles.

Un grognement, pareil à celui d’une bête, sortit de la poitrine de Bram. Le feu ardent qui flamboyait dans les yeux gris devint plus brillant.

« Ah ! l’homme de la police ? Celui qui est venu du Fort Churchill et que les loups ont tué ? »

Bram laissa tomber le revolver et le couteau. Il ne conserva dans ses mains que le fouet et le gourdin. Les loups faisaient cercle derrière Philip et il n’osait pas se retourner, pour les regarder. Leur silence sinistre l’emplissait d’effroi. Ils attendaient un ordre de Bram, ils épiaient un geste de lui. Leur instinct leur disait que cet ordre, après lequel ils haletaient, tremblait déjà sur les lèvres épaisses du maître. L’instant était décisif et follement terrible.

Philip sortit de sa poche son portefeuille.

« Bram Johnson, dit-il, tu as perdu quelque chose, durant la nuit où tu as campé près de la case de Pierre Bréault. »

Sa voix s’était comme empâtée et le timbre en semblait étrangement fêlé.