Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/112

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fins, si réguliers, aux profils grecs, à la taille élégante et souple, qu’on aperçoit même parmi les dernières classes de la nation. Rien de si beau que les vieillards, de si affreux que les vieilles femmes russes. J’ai vu peu de bourgeoises. Une des singularités de Pétersbourg, c’est que le nombre des femmes, relativement à celui des hommes, y est moindre que dans les capitales des autres pays ; on m’assure qu’elles forment tout au plus le tiers de la population totale de la ville.

Cette rareté fait qu’elles ne sont que trop fêtées : on leur témoigne tant d’empressement qu’il n’en est guère qui se risquent seules passé une certaine heure dans les rues des quartiers peu populeux. Dans la capitale d’un pays tout militaire et chez un peuple adonné à l’ivrognerie, cette retenue me paraît assez motivée. En général, les femmes russes se montrent moins en public que les Françaises ; il ne faudrait pas remonter bien haut pour arriver au temps où elles passaient leur vie enfermées comme les femmes de l’Asie. Il n’y a guère plus de cent ans que les Russes les tenaient sous clef. Cette réserve, dont le souvenir se perpétue, rappelle, comme tant d’autres coutumes russes, l’origine de ce peuple : elle contribue à la tristesse des fêtes et des rues de Pétersbourg. Ce qu’on voit de plus beau dans cette ville, ce sont les parades, tant il est vrai que c’est à bon droit que je vous ai dit que toute ville russe, à commencer par la capitale,