Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/204

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parlez pas de cela, » refrain obligé et qui revient comme une phrase parasite, après chaque phrase articulée par un Russe ou par un étranger acclimaté.

J’avoue que ce trait n’est pas aussi révoltant que le crime de Burk en Angleterre, mais ce qui caractérise la Russie, c’est le silence protecteur qu’on y garde religieusement sur de semblables forfaits.

Le cousin s’est tu ; la maîtresse de la victime n’a pas osé se plaindre ; et aujourd’hui, après six mois, je suis peut-être la seule personne à laquelle elle ait raconté la mort de sa femme de chambre, parce que je suis étranger… et que je n’écris pas, à ce que je lui ai dit.

Vous voyez comment les agents subalternes de la police russe font leur devoir. Ces employés infidèles ont trouvé un double avantage à trafiquer du corps de la femme assassinée : ils en tiraient d’abord quelques roubles, ensuite ils cachaient le meurtre qui leur eût attiré une sévère remontrance, si le bruit de cet événement se fût répandu.

Les réprimandes adressées aux hommes de cette classe sont, je crois, accompagnées de démonstrations un peu rudes et destinées à graver ineffaçablement les paroles dans la mémoire du malheureux qui les écoute.

Un Russe de la basse classe est autant battu que salué en sa vie. Je n’ai jamais vu autant de gens se