Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/226

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tefois c’est un mot prononcé par lui, innocemment, je le pense comme vous, qui a causé le mal : voici le fait. Malgré les injustices des préposés de la couronne, le sort des paysans de l’Empereur est encore préférable à celui des autres serfs, et sitôt que le souverain se rend propriétaire de quelque nouveau domaine, les habitants de ces terres acquises par la couronne deviennent l’objet de l’envie de tous leurs voisins. Dernièrement il acheta une propriété considérable dans le canton qui s’est révolté depuis ; à l’instant, des paysans sont députés de tous les points du pays vers les nouveaux administrateurs des terres Impériales, pour faire supplier l’Empereur d’acheter aussi les hommes et les domaines du voisinage ; des serfs choisis pour ambassadeurs sont envoyés jusqu’à Pétersbourg : l’Empereur les reçoit, il les accueille avec bonté ; cependant, à leur grand regret, il ne les achète pas. Je ne puis, leur dit-il, acquérir la Russie tout entière, mais un temps viendra, je l’espère, où chaque paysan de cet empire sera libre ; si cela ne dépendait que de moi les Russes jouiraient dès aujourd’hui de l’indépendance que je leur souhaite, et que je travaille de toutes mes forces à leur procurer dans l’avenir.

— Eh bien, cette réponse me paraît pleine de raison, de franchise et d’humanité.

— Sans doute, mais l’Empereur devrait savoir à