Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 2, Amyot, 1846.djvu/357

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miner en détail : j’avais demandé une prison d’État, on me répond par des écluses.

Le ministre de la guerre terminait son billet en m’annonçant que l’aide de camp général, directeur des voies de communications de l’Empire, avait reçu l’ordre de me donner les moyens de faire ce voyage avec facilité.

Quelle facilité !… bon Dieu !… à quels ennuis m’avait exposé ma curiosité ! et quelle leçon de discrétion ne me donnait-on pas par tant de cérémonies qualifiées de politesses ! Ne pas profiter de la permission quand les ordres étaient envoyés pour moi sur toute la route, c’eût été m’exposer au reproche d’ingratitude ; examiner les écluses avec la minutie russe, sans même voir le château de Schlusselbourg, c’était donner volontairement dans le piége et perdre un jour : perte grave en cette saison déjà bien avancée pour tout ce que j’ai le projet de voir encore en Russie, sans toutefois y passer l’hiver.

Je résume les faits : vous en tirerez les conséquences. On n’est pas arrivé ici jusqu’à parler librement des iniquités du règne d’Élisabeth ; tout ce qui fait réfléchir sur la singulière espèce de légitimité du pouvoir actuel passe pour une impiété ; il a donc fallu mettre ma demande sous les yeux de l’Empereur : celui-ci ne veut ni l’accorder ni la refuser directement : il la modifie et me permet d’admirer une merveille d’in-