Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/42

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tions de tous genres auxquelles elle s’est soumise par choix. Elle a voulu vivre, elle a vécu, elle est devenue grosse, elle est accouchée, elle a élevé ses enfants sous une zone où la longueur et le froid de l’hiver nous paraissent contraires à la vie. Le thermomètre y descend chaque année de 36 à 40 degrés : cette température seule suffirait pour détruire la race humaine… Mais la sainte femme a bien d’autres soucis.

Au bout de sept années d’exil, lorsqu’elle vit ses enfants grandir, elle crut devoir écrire à une personne de sa famille pour tâcher qu’on suppliât humblement l’Empereur de permettre qu’ils fussent envoyés à Pétersbourg ou dans quelque autre grande ville, afin d’y recevoir une éducation convenable.

La supplique fut portée aux pieds du Czar, et le digne successeur des Ivan et de Pierre Ier a répondu que des enfants de galérien, galériens eux-mêmes, sont toujours assez savants.

Sur cette réponse, la famille,… la mère,… le condamné, ont gardé le silence pendant sept autres années. L’humanité, l’honneur, la charité chrétienne, la religion humiliés, protestaient seuls pour eux, mais tout bas ; pas une voix ne s’est élevée pour réclamer contre une telle justice.

Cependant aujourd’hui un redoublement de misère vient de tirer un dernier cri du fond de cet abîme.