Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/73

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les voitures ainsi emportées éprouvent tous les mouvements d’un vaisseau : le tangage et le roulis combinés comme dans les grands orages ; pour résister à ces longs balancements sur une route unie comme celle-ci, mais dont le fond est dur, il faut, je vous le répète, qu’elles aient été construites dans le pays.

— Vous avez encore le vieux préjugé des voitures lourdes et massives ; ce ne sont pourtant pas les plus solides.

— Bon voyage ! vous me direz des nouvelles de la vôtre, si elle arrive à Moscou. »

À peine avais-je quitté cet oiseau de mauvais augure qu’un lisoir a cassé. Nous étions près du relais, où me voici arrêté. Notez que je n’ai fait encore que dix-huit lieues sur cent quatre-vingts… Je serai forcé de renoncer au plaisir d’aller vite, et j’apprends un mot russe pour dire : doucement ; c’est le contraire de ce que disent les autres voyageurs.

Un postillon russe, vêtu de son cafetan de gros drap, ou s’il fait chaud comme aujourd’hui, couvert de sa simple chemise de couleur qui fait tunique, paraît au premier coup d’œil un homme de race orientale ; à voir seulement l’attitude qu’il prend en s’asseyant sur son siége, on reconnaît la grâce asiatique. Les Russes ne mènent qu’en cochers, à moins qu’une voiture très-lourde n’exige un attelage de six ou huit chevaux, et même dans ce cas le premier postillon