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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/100

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village distant de sa maison de plus d’une lieue. J’aurais protesté contre cet excès de zèle du feldjæger, mais je l’ai ignoré jusqu’au matin. Par la fenêtre de mon chenil, à travers le demi-jour qu’on appelle la nuit en Russie, je pouvais admirer à loisir l’inévitable péristyle romain avec son fronton de bois blanchi à la chaux, et ses colonnes de mortier qui ornent du côté de l’étable la façade des maisons de poste russes. Cette architecture maladroite est un cauchemar qui me poursuivra d’un bout de l’Empire à l’autre. La colonne classique est devenue le cachet de l’édifice public en Russie.

Précaution indispensable pour voyager en ce pays : — vous ne vous attendez guère à celle-ci : — c’est une serrure russe avec ses deux anneaux ; la serrure russe est une mécanique aussi simple qu’ingénieuse. Vous arrivez dans une auberge remplie de gens de plusieurs sortes ; vous savez d’ailleurs que tous les paysans slaves sont voleurs, si ce n’est de grands chemins, au moins de maison ; vous faites déposer vos paquets dans votre chambre, puis vous vous apprêtez à vous aller promener. Toutefois avant de sortir vous voulez, non sans raison, fermer votre porte et tirer votre clef : point de clef… pas même de serrure ! à peine un loquet, un clou, une ficelle ; enfin rien : c’est l’âge d’or dans une caverne… l’un de vos gens garde votre voiture ; si vous ne voulez