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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 4, Amyot, 1846.djvu/52

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que les ridicules du parvenu peuvent exister en masse et devenir l’apanage d’une nation tout entière.

Les clochers peints et dorés, presque aussi nombreux que les maisons d’Yaroslaf, brillent de loin comme ceux de Moscou, mais la ville est moins pittoresque que ne l’est la vieille capitale de l’Empire. Le Volga la borde, et du côté de ce fleuve elle se termine par une terrasse élevée et plantée d’arbres ; un chemin de service passe sous ce large boulevard, il descend de la ville au fleuve dont il coupe à angle droit le chemin de halage. Cette communication nécessaire n’interrompt pas la terrasse, qui se continue par un beau pont, au-dessus du passage ouvert aux besoins du commerce. Le pont déguisé sous la promenade ne s’aperçoit que d’en bas ; cet ensemble est d’un bon effet, il ne manque à la scène, pour paraître imposante, que du mouvement et de la lumière ; mais, malgré son importance commerciale, cette ville, si plate, si régulière, paraît morte ; elle est triste, vide et silencieuse ; moins triste, moins vide, moins silencieuse encore que la campagne qu’on aperçoit du haut de sa terrasse. Je me suis imposé l’obligation de vous faire voir tout ce que je vois : il faut donc vous décrire ce tableau, au risque de vous paraître insipide, et de vous ennuyer comme je m’ennuie à le contempler.

C’est un immense fleuve gris, aux rives abruptes