Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/109

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richissent nos colonies n'en sont point originaires : l'indigo y fut apporté des Indes ; le sucre, de Sicile, où il était aussi venu des Indes ; le café, venu d'Arabie au Jardin des Plantes, et porté à la Martinique, a fait la fortune de milliers de propriétaires et de négociants qui ignorent que c'est à Antoine de Jussieu qu'ils le doivent ; et si Poivre et Sonnerat n'avaient laissé des témoignages écrits de leurs travaux, Cayenne et l'Île de France oublieraient bientôt qu'ils hasardèrent leur vie pour donner à ces îles le girofle et la muscade.

Lemonier et quelques-uns de ses amis ont puissamment contribué à faire naître et à encourager en France ce goût pour naturaliser les végétaux utiles. Lemonnier surtout se livra sans interruption à cet objet pendant plus de cinquante années. Les jardins de Saint-Germain, de Trianon, de Bellevue furent remplis par lui des arbres étrangers les plus rares. Un terrain qu'il avait acquis de madame de Marsan, son amie, devint une espèce de dépôt, où des graines et des plants arrivaient de toutes les parties du monde, et d'où il en distribuait les rejetons à tous les amateurs. Il fit plus, il tenta d'en enrichir nos forêts. Des cèdres du Liban furent plantés dans le Roussillon, des pins de Weymouth dans différents endroits de la forêt de Fontainebleau ; plusieurs lieux incultes des environs de Rouen furent convertis en superbes forêts de pins maritimes et de sapins du Nord ; de pareilles forêts furent créées aux environs du Mans et en divers endroits des côtes. Avec le temps, notre marine aurait profité de ces travaux, si l'incurie des administrateurs ne les avait laissé détruire depuis quel-