Page:Cuvier - Recueil des éloges historiques vol 1.djvu/454

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faisait geler le mercure ; des étés insupportables par leur chaleur pendant le peu de semaines qu’ils duraient ; la plus grande partie du temps de la course employée à gravir des rochers, à passer des marais à gué, à se frayer un chemin dans les bois en abattant les arbres ; ces myriades d’insectes qui remplissent l’air du nord, l'ensanglantant à chaque minute ; des peuplades empreintes de toutes les misères du pays, d’une malpropreté dégoûtante, souvent d’une laideur monstrueuse, toujours tristement stupides ; les Européens mêmes abrutis par le climat et l'oisiveté : tout cela aurait pu refroidir l'imagination la plus vive.

Après une longue traversée, le moindre coin de terre, la moindre verdure semblent un paradis au navigateur, et quand c’est aux îles des Amis ou à Otaïti qu’il aborde, il devient poète malgré lui. Au Kamtschatka n’est-ce pas déjà beaucoup d'avoir la force d’écrire ?

M. Pallas, tout jeune et vigoureux qu’il était, revint accablé de souffrances, suites d’un voyage si pénible trente-trois ans ses cheveux étaient blanchis ; des dyssenteries répétées l’avaient affaibli ; des ophtalmies opiniâtres menaçaient sa vue. Ses compagnons avaient été encore plus maltraités ; presque aucun d’eux ne vécut assez pour publier lui-même sa relation, et ce fut encore M. Pallas dont l’activité s’employa pour rendre ce soin à leur mémoire.

Les grands objets qu’il venait de voir l'avaient trop frappé pour qu'il pût se contenter du journal qu’il