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L’ARTISTE ET L’ŒUVRE MUSICAL

chrétien. La douleur de l’exil terrestre y prend l’accent de la prière. L’harmonie très soutenue du quatuor, les lignes dessinées par les violons, les épisodes confiés aux instruments à vent ne trahissent jamais la moindre préoccupation volupteuse, mais expriment toujours les plus hauts désirs du cœur, tout pénétré de divin[1]. »

Cette tendance mystique, mais d’une charmante et saine mysticité, s’accentue encore dans la Procession (première audition à la Société Nationale le 27 avril 1889) dans la Vierge à la crèche, exquise peinture de primitif ombrien, où le charme sincèrement naïf de la musique fait oublier les quelques mièvreries de la poésie ; — on dirait une petite madone de Bartolo di Fredi qui se serait échappée d’une muraille de San Gimignano pour venir à Paris se faire musique.

On retrouve encore les traces de cette religieuse tendresse dans la plupart des versets pour le Magnificat qui furent publiés après la mort de Franck sous le titre banal : L’organiste, 59 pièces pour harmonium.

Qui de nous ne se souvient de la joie de notre maître lorsque, alternant avec le chœur, il impro-

  1. Gustave Derepas, op. cit.