Page:D’Indy - César Franck, 1906.djvu/203

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
193
L’ARTISTE ET L’ŒUVRE MUSICAL

parties précédées d’un prologue : en huit chants, devrais-je dire, pour poursuivre son assimilation au poème épique des anciens. Chacun de ces chants est, à lui seul, un petit poème présentant antithétiquement un double tableau : d’abord, un exposé, douloureux ou violent, des vices et des maux qui règnent sur la terre, ensuite, l’affirmation céleste de l’expiation de ces vices, du remède à ces maux, enfin, soit entre les deux, soit en guise de conclusion, la voix du Christ vient, en quelques paroles, proclamer la béatitude promise aux guéris et aux sanctifiés. Chacune des parties du poème est donc comme un véritable triptyque dans toute la réalité du terme : deux volets se faisant face et se complétant par des contraires, tandis que le point central est occupé par la radieuse figure du Christ, toujours la même et cependant toujours différente en ses diverses attitudes.

Cette conception, si harmonieuse par la correspondance et l’absolu équilibre des parties constitutives, émane de Franck lui-même, je ne saurais trop le répéter, car le fait est remarquable à une époque où aucun musicien ne songeait à s’inquiéter de l’agencement et de la réalisation de son sujet, laissant tout faire au parolier.

Et quoi de plus « Franck », en effet, que cette œuvre, dans laquelle, indépendamment du rôle